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    25 octobre 2016 2 25 /10 /octobre /2016 15:11

    Cet enfant là sait pourquoi il est venu.

    Il a un projet. Un vrai. Un puissant.

    Il n’est pas venu pêcher ni découvrir les recoins cachés dans la nature de la Brenne. Il n’est pas venu collectionner les mille-pattes non plus. Ni jouer de l’accordéon à la tombée de la nuit. Il n’est pas venu pour apprendre mille chansons, ni pour jouer à la plus grande tour de kapla. Même s’il fera quand même un peu tout ça.

    Il est venu pour se fabriquer un banjo.

    Sauf que dans cette colo là, nous n’avons pas d’atelier, ni de lieu particulièrement conçu pour du bricolage.

    Mais il y a Maurice. Maurice, (s’il ne s’appelle pas Maurice, c’est Marcel, ou quelque prénom de super papi comme ça), il habite là, il vit là, il a les yeux de la couleur des murs et la peau de la couleur du sol de la cour. Maurice, c’est le caméléon du lieu, les mains calleuses et la peau tannée. Maurice, il entretient les coins et recoins du lieu pour qu’il garde son authenticité tout en étant chaleureux, fonctionnel, et accueillant. Maurice, il est bougon mais toujours présent. Un bonhomme …

    Alors quand il apprend que ce petit jeune homme là a ce projet là, Maurice qui regardait de haut la colo se prend d’affinité pour ce môme et son projet. Il trouve tout. Les outils, la récup, tout ce qu’il faut pour qu’enfin ce môme là ait un banjo. Son banjo. Fais lui-même. Avec les clous de Maurice et de vraies cordes de guitare. Et la justesse des quelques notes bricolées qui en sortent à la fin.

    Du moment où il a eu son banjo, il ne l’a pas quitté. Le banjo près de la table aux repas, le banjo à chaque moment de chorale, le banjo sous le lit la nuit…

    Je ne sais pas ce qui m’a le plus touché … l’aboutissement de ce projet finalement assez simple, la volonté de cet enfant venu juste pour ça, ou la complicité qui s’est construite entre Maurice et ce gamin pour fabriquer le banjo…

    Et toi gamin devenu grand aujourd’hui… tu racontes à tes mômes l’histoire de ce banjo ? Il est resté planqué sur une armoire chez tes parents ?

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    18 août 2014 1 18 /08 /août /2014 23:51

    Il était une fois Petit mille-pattes. Petit mille-pattes qui se faufile qui se dandine dans les couloirs. Petit mille-pattes s’est baladé lorsque le Petit Lord n’était pas là. Petit mille-pattes a retrouvé sa cachette.

     

    Il était une fois, un joli papillon égaré dans une chambre. Joli papillon tourne tourne tourne en rond. Joli Papillon virevolte dans tous les sens pour éviter les mains du Petit Lord. Petit Papillon s’échappe par la fenêtre, et le Petit Lord auss… Non ! Je ne sais plus si c’est Bibi Thomas Christophe ou Amzo, mais l’un deux l’a rattrapé à temps, Little Lord suivait son papillon.

     

    Il était une fois un jour de pêche à l’épuisette. Cédric le grand barbu, qui connaît chaque brin d’herbe du quartier, éveille les sens des enfants et leur fait découvrir les joies des toutes les petites bêtes de l’étang. Mini sangsues, notonectes, dytiques, planorbes et autre argyronètes se baladent dans le bocal. Little Lord dans son épuisette attrape un poisson chat. Magnifique. Monstrueux. Affamé.

     

    Poisson-chat se retrouve  avec les petites bêtes du bocal. Un ouragan plus tard, l’eau du bocal est translucide.

    Poisson-chat n’a plus faim, il regarde béatement le Petit Lord.

     

    Il était une fois Long Scolopendre. Magnifique. Poilu. Vif. La truffe brillante. Du genre qui traverse les couloirs en courant. Du genre qui effraie les petites filles. Du genre qui fait trépigner le Petit Lord. Long Scolopendre rencontre une enveloppe glissée par les petits doigts de Little Lord, et rejoint ses copains.

     

    Il était une fois un Petit Lord. Les yeux brillants, au moment de l’inventaire de fin de séjour, il nous dévoile ses trésors. Quatre enveloppes, légèrement gonflées, cachées sous son matelas. Quatre enveloppes que je lui ai « prêtées » en début de séjour. Dans la première, Long Scolopendre et ses copains, toujours poilus, mais bien moins vifs. Dans la deuxième, des araignées, mais sans leur toile, les yeux éteints. Dans la troisième, des cloportes, des vrais, trouvés au creux des pierres de notre ancienne écurie. Et enfin, dans la dernière, des myriapodes. Un joli nom pour une bestiole munie de lassos sur le corps. Un vrai trésor pour notre enfant Princier, qui les aurait préféré vivantes ses petites bestioles, mais ne savait pas comment faire pour les garder.

     

    Nous, on n’a rien vu. Ni qu’il y avait autant de petites bestioles dans les murs. Ni que le Petit Lord faisait des collections. Ni qu’il éradiquait tranquillement l’écosystème des murs de l’écurie.

     

    Et pourtant, on a très peu laissé cet enfant là sans surveillance, avec sa manie de suivre les papillons par les fenêtres du deuxième étage.

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    8 août 2014 5 08 /08 /août /2014 23:08

    Quelqu’un dort à la colo. Quelqu’un est venu en costume et avec un chapeau. On pourrait croire qu’il est venu raconter des histoires, on pourrait croire qu’il est venu nous faire un petit concert, on pourrait croire qu’il est déguisé puisque nous sommes plutôt en short nous…

     

    On pourrait croire. Mais non. Quelqu’un est venu voir « comment ça se passe ». Quelqu’un est là dès le matin, à 7h00 il est debout. Et sceptique. Depuis quand les parents payent pour laisser dormir les enfants ? Depuis quand ce sont les enfants qui décident à quelle heure ils peuvent se lever, et même aller manger ? Depuis quand on n’est pas tous à 9h00 pile au garde à vous pour la séance de gym chansons paillardes ? Depuis quand ?

     

    Moi, j’ai le trac.

     

    Ce monsieur là nous a confié au nom de l’entreprise pour laquelle il travaille environ plus ou moins la moitié des 70 enfants présents sur le centre. Ce quelqu’un là avec son lien avec l’association pour laquelle nous travaillons fait presque à lui tout seul vivre l’association. Alors forcément, ce n’est pas rien, la visite de quelqu’un. Ce jour là je mets mon plus joli short, et je lui explique le projet, le p’tit dej, et puis je lui fais vivre surtout.

     

    Quelqu’un passe la journée avec nous, son costume, et son chapeau. Il a un petit air désuet. Avant de nous quitter, Quelqu’un me dit qu’il était sceptique, voire même critique de ce que je lui avais présenté. Mais qu’il se trouve ravi de voir avec quelle autonomie et quel respect des autres les enfants évoluent dans le centre, le nombre d’activités qu'ilsfont et de projets qu'ils ont même si à 10h30 le petit Viking dort encore.

     

    Alors moi, j’éclate toute entière lorsque le soir les enfants sont endormis, et que l’on se retrouve entre adultes. C’est mon premier gros projet gros comme ça, depuis tout le début que j’écris tous ces mots là qui me font grandir, de l’enfant à la fermeture éclair à l’enfant-lune, j’en suis arrivée à me dire que c’est une évidence que c’est comme ça qu’il faut faire en collectif d’enfants.

     

    Mais je sais que tout le monde est loin d’en être convaincu, que tout le monde n’a pas grandi avec moi. Et Quelqu’un non plus.

     

    Bibi non plus n’a pas grandi avec moi.

     

    Bibi est rentré dans la colo déjà grand, intérieurement et complètement composé dans sa tête son corps et son cœur pour respecter chaque enfant pour ce qu’il est, pour ce qu’il peut apporter, pour son chemin à venir. Et c’est ce que j’aime chez lui (en plus de ses mains sa voix et sa musique, mais là ça ne compte pas). Et c’est pour ça que j’ai voulu l’emmener avec nous dans cette aventure même s’il n’avait jamais fait ce boulot là.

     

    Bibi ne comprends pas ce qu’il me prend d’être à ce point ravie que Quelqu’un apprécie notre projet et l’organisation de notre petite colo. Ou plutôt si. Bibi comprends trop bien qu’on n’a pas fait tout ça pour les mômes, qu’on a fait tout ça pour le vendre à ceux qui achètent le séjour. Moi, je ne comprends pas ce que Bibi a compris, je ne comprends pas mais je vois qu’il boude. Qu’il me boude. Plusieurs jours. Je tiens ma place, je continue, je fais comme si, mais quelque chose est cassé sur notre colo qui ne tourne plus très rond.

     

    J’ai souvenir de la cassure, mais je ne sais plus comment nous avons retrouvé le tourne en rond de notre colo. Je sais qu’on a longtemps parlé, je sais aussi que j’ai essayé d’expliquer que même si nous étions convaincus, nous, de la raison d’être de ce projet pour les enfants que l’on nous confiait, nous n’étions modestement qu’un petit wagon d’un train bien plus grand, qui s’il n’a pas de loco ni de chauffeur ne pourra pas partir très loin.

     

    Aujourd’hui encore, je ne suis pas complètement sûre d’avoir convaincu Bibi ce jour là que c’était bien du fond du cœur et de mes valeurs que ce projet avait pu voir le jour. Les rares fois où nous nous sommes croisés j’ai retrouvé sa voix, ses mains sa musique et le sourire ravi de nos souvenirs. Même si j’aurai toujours ce doute en moi, quel plaisir ça a été d’avoir pu travailler avec la spontanéïté de cet animateur nouveau-né déjà si grand de son histoire à lui, de ses convictions, ses valeurs, qu’il portait comme des évidences, comme son saxo sur son dos (pieds nus pour traverser Paris), là où moi il m’avait fallu plusieurs années d’expérience pour me les construire.

     

    (cliquez dessous pour voir comment ce type déjà grand il y a (presque) 20 ans a continué de grandir)

     

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    22 juin 2014 7 22 /06 /juin /2014 11:28

    Un Viking, c’est grand c’est fort, c’est résistant.


    Un Viking, ça navigue sur les flots, ça se moque du temps qu’il fait, ça a les cheveux blonds, et un prénom qui claque en une syllabe. Sinon, ce n’est pas un Viking.


    Nous, on a notre Viking. Il est comme ça, à fond, tout le temps, et convaincu de ce qu’il veut faire. Il a 9 ou 10 ans.


    Mais, on ne le dit pas assez, c’est fatigant d’être un Viking… Et un Viking fatigué, c’est pareil, à fond, quel que soit le temps qu’il fait et les bruits autour. Il dort. A fond.


    Rien n’interrompt son sommeil. Ni le bruissement des affichettes jour/nuit que l’on retourne, ni les chuchotis des premiers réveils, ni les douches de ceux qui préfèrent le matin, pas plus les habillages discrets ou moins discrets, rien de mieux pour les éclats de rire du Roi d’Agobert qui met sa culotte à l’envers. La voix forte d’un animateur qui rattrape un môme par la fenêtre ? Même pas ! Et même l’aspirateur dans les chambres d’à côté... Un Viking qui dort, ça dort terriblement profondément.


    Si tu doutes du petit déjeuner individualisé, le Viking ne peut que te convaincre qu’à défaut d’être bien tout court, c’est bien pour lui. Ensuite, le Viking mange. Seul en cuisine, chouchouté par les « dames ». Tu savais que quand tu travailles en cuisine, tu es une « dame » ? On oublie souvent que c’est classe d’être une « dame », moi je trouve ça classe. Même de cuisine. Surtout de cuisine d’ailleurs… que ferait-on sans elles ??


    Puis le Viking rejoins un groupe, une activité, les cheveux encore un peu en pétard, il faut dire qu’un look de Viking, ça s’entretient. Parfois le Viking s’arme de courage et demande un réveil plus tôt pour ne pas louper le départ en aventure du matin. Mais c’est assez rare, ou encore c’est compromis par le « Grmmph » matinal du Viking qui, décidément, dort à fond.


    Le Viking a un papa. Qui bosse. Et qui est intimement convaincu que c’est bien plus mieux pour son petit Viking de partir 15 jours en vadrouille que de vadrouiller 15 jours dans le quartier. Un papa qu’au bout de quelques jours j’appelle pour lui parler du sommeil de son petit Viking. Le papa Viking (sûrement barbu, enfin j’imagine) est plus que ravi de savoir qu’en plus d’être allé vadrouiller et découvrir sa vie rien qu’à lui pendant 15 jours, son rejeton reprendra sûrement l’école reposé.


    Et à fond ?

     

     

     

    http://www.sticker-autocollant.com/9804-15192-thickbox/stickers-enfant-viking.jpg

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    11 juin 2014 3 11 /06 /juin /2014 22:11

    Un petit déjeuner individualisé, c’est mettre en place un matin où chaque enfant est respecté dans son rythme. C’est mettre en place un réveil qui a un air de vacances, puisque chacun dormira ce dont il a besoin pour être bien.


    C’est un gros boulot de préparation, un gros boulot de mise en place les premiers jours, mais une fois que ça tourne, c’est du bonheur pour tout le monde.


    7h00 à peine. L’heure des premiers adultes. Christophe, c’est le directeur adjoint .L’homme blond aux cheveux longs qui dessine si bien les clowns et dompte les enfants rebelle dans les escaliers ; celui-là encore qui raconte des histoires dans les oreilles des enfants lorsqu’ils tombent dans l’herbe. Christophe donc, ou moi, avons le privilège de la cuisine, à l’heure où tout le monde dort encore. Mettre le lait à chauffer, démarrer la cafetière, préparer les produits frais sur la table du buffet. Le reste a été préparé la veille par le personnel de restauration.


    7h00 encore. Un animateur louvoie dans les couloirs, il accueille au réveil les plus matinaux, mais surtout passe discrètement dans chaque chambre. Il retourne la petite pancarte près de la porte, où le symbole de la nuit fait place à un joli soleil. C’est le signe que l’on peut se lever, mais discrètement, les adultes sont levés.


    7h00 toujours. Un animateur ouvre la grande salle d’activités : dans un coin les kaplas, ailleurs les voitures, dans un autre du dessin. Il y a aussi des bouquins, des jeux de société et tout ce qu’il faut pour se réveiller, se retrouver aussi, ou juste trainer un peu.


    7h00, déjà. L’heure des premiers enfants aussi. Ils mettent un pull par-dessus le pyjama, passent aux toilettes, enfilent leurs chaussures, font un câlin parfois à l’animateur qui est là, puis rejoignent la salle.


    7h30. La salle du petit dej est ouverte. Ho rien d’obligatoire ! Tu peux finir ton bouquin, venir manger directement si tu viens de te lever ; aller faire une tour géante en kaplas si tu préfères attendre tes copains qui dorment encore pour venir déjeuner. Les animateurs se lèvent au rythme des enfants et se relaient aussi, pour manger à leur tour. Jusqu’à 9h00 tu peux venir manger.

    Jusqu’à 9h00.


    Oui, mais si tu dors encore ? Si tu dors encore, les copains viendront super discrètement chercher leurs habits, préparés la veille au soir, et s’habilleront dans la salle de bain. Un animateur restera au niveau des chambres, et lorsque tu te réveilleras, il t’accompagnera en cuisine. Le personnel de ménage fera ta chambre après les autres. En cuisine, la cuisinière te préparera un petit dej rien que pour toi.


    Ensuite, tu pourras rejoindre les copains en activité.


    Un petit déjeuner individualisé, c’est un rythme de vie respecté, et une colo qui démarre chaque matin en toute sérénité.

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    1 juin 2014 7 01 /06 /juin /2014 22:15

    Je ne sais plus.

     

    Je ne sais plus combien d’animateurs sont là.

     

    Je sais qu’il y a Thomas, sa basse, sa bonne humeur, tout ce qu’il faut ;

     

    Je sais qu’il y a une jeune musicienne classique qui un jour laissera échapper son gobelet de thé brulant, je pense que sa cuisse s’en souvient encore ; A moins que c’était bien à cet endroit là mais au séjour du mois d’aôut précédent ?

     

    Je sais qu’il y a une demoiselle qui joue de l’accordéon, musique folklorique ;

     

    Je sais qu’il y a un jeune plutôt pop qui joue de la guitare électrique ;

     

    Il y  a Bibi, qui se promène à pieds en région parisienne, le saxo sur le dos. Un mec droit aux mains géantes et au talent fou, qui part pour la première fois faire une colo ; Il sillonne toujours les routes du coin, et chante comme divinement bien.

     

    Il y a une copine de longue date et son violon, animatrice chevronnée et future maîtresse d'école ;

     

    Il y a Ana et son piano (à moins, que non pas cette fois là, je ne sais plus trop) ;

     

    Il y a Zou, une pêche d'enfer, des idées plein la tête. C'est une fille ;) ;

     

    Il y a Amzo et ses percussions africaines ;

     

    Il y a Christophe, mon adjoint, qui joue de tout ce qu’il touche ;

     

    Il y a moi, qui ne joue de rien lorsque je n’ai pas de partition ;

     

    Il y a 70 mômes et un projet dans lequel chaque enfant, après un temps de découverte, va choisir avec quel animateur il va faire de la musique. Il y a une colo où les mômes écoutent et pratiquent de tout sur tous les styles. Il y a une colo où une bonne douzaine d’adultes vivent ensemble 14 jours, alors que, pour certains, ils ne se seraient peut-être jamais rencontrés sans cette colo.

     

    Il y a un projet dans lequel nous allons tous découvrir les moindres petites et grosses bêtes du coin, accompagnés par les aventuriers locaux qui connaissent chaque coin et recoin par cœur.

     

    Il y a un projet dans lequel les enfants se retrouveront parfois pour chanter ensemble, et aussi faire des batucadas, de temps en temp.

     

    Il y a un projet dans lequel on souhaite que chaque enfant trouve sa place, et rentre autant ravi de ses vacances que reposé avant de reprendre l’école.

     

    Il y a notre premier vrai grand projet, et qui nous tient fort à cœur.

     

    On t’emmène ?

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    23 mai 2014 5 23 /05 /mai /2014 19:38

    La nuit fut noire et douloureuse. Etrange aussi. Je suis fatiguée. L’enfant et son otite dorment enfin.


    Un animateur arrive en portant dans les bras notre enfant-bulle aux joues à croquer. « T’inquiète pas, il est tombé dans l’herbe, il doit juste avoir une écorchure au genou ! ».


    Ouf.


    Sauf que...


    Sauf que la tache sombre qui s’agrandit sur son pantalon ne correspond pas à la description de la chute. Sauf que quand l’enfant baisse son pantalon il le remonte aussitôt, livide. « C’est un gros bobo tu sais ».


    La plaie est plus grande que le petit genou, je m’assieds pour ne pas tomber lorsque je vois ce petit genou qui a l’air explosé. Et j’appelle les pompiers. C’est un gendarme qui me répond. Que les pompiers sont mobilisés sur un feu de ferme… il va falloir vous débrouiller ma bonne dame on ne peut rien faire pour vous.


    Heuuu… mais s’il y avait le feu sur la colo ? S'il avait perdu connaissanc ? Si... « Oui, ben y’ pas le feu on n’va pas inventer des problèmes là où y’en n’a pas hein ! »


    Lui il n’a peut-être pas de problème, mais moi oui. Et l’enfant au dossier médical plus grand que lui aussi.


    J’appelle le médecin. Pas le Père Noël qui fait médecin la nuit, non, le vrai Père Noël.


    Ou le vrai médecin, je ne sais plus.


    Le vrai médecin finalement, qui me conseille les premiers soins à faire, avant de passer le voir sur le chemin de l’hôpital.


    On roule, l’enfant-bulle est effrayé, je suis loin d’être rassurée, à la colo, le temps s’est arrêté.

    Le vrai médecin nous accueille devant son cabinet. « Ha oui quand même, c’est plus important que je ne le croyais ! » Heu… sil s’était juste s’agit de deux points de suture nous n’aurions pas fait autant de bruit docteur…


    A l’hôpital, nous sommes attendus. Pas l’enfant bulle qui a besoin de soins, non, nous, les adultes! L’enfant-bulle hurle tout ce qu’il peut. Pas de douleur non, il dit même qu’il n’a pas mal, mais de peur, de « déjà vus » et de son histoire qui n’a pas du être toujours très drôle.


    Nous sommes attendus pour un interrogatoire serré. Vu l’état du genou de l’enfant-bulle, effectivement fort impressionnant, nous sommes forcément des inconscients… Pendant ce temps, la petite voix enrouée d’avoir crié, répète inlassablement « Maischuistombédanslherbeuuuuuuh ! » Il a compris ce petit bonhomme que ces médecins sont en train de nous dire que s’il a mal au genou, c’est de notre faute. Alors il répète encore et encore « Maischuistombédanslherbeuuuuuuh ! ».


    Puis je me fâche un coup. « C’est pas bientôt fini de crier, puis de chouiner, puis de trépigner, d’ailleurs tu peux pas trépigner tu as le genou tout abîmé ! Il fallait pas sauter sur les lits la si la sol fa mi, tu seras privé de dessert, la si la sol fa mi aussi ! ». Ha non, je m’embrouille, ce n’est pas après l’enfant bulle que je me fâche, c’est après le personnel soignant qui joue les détectives privés alors que l’enfant a besoin d’une radio, de points de suture, et qu’on s’en aille de cet hôpital !


    Ok je connais mes responsabilités, on va effectivement chercher à comprendre ce qui s’est passé pendant ce jeu éminemment dangereux qu’est le facteur (mais qui vous a dit qu’il sautait sur les lits ?), mais en attendant il faut soigner cet enfant.


    Une heure le facteur n’est pas passé, deux heues, le facteur n'est pas passé, ..., cinq heures l’enfant-bulle n’est toujours pas soigné.


    Opération sous anesthésie locale, la voix de mon adjoint si blond aux cheveux longs qui raconte à l’enfant bulle une histoire dans l’oreille. (de renard, je crois, l’histoire). Une histoire dont les soignants ne voulaient pas, « vous n’êtes pas les parents ». Une histoire qu’ils ont finie par réclamer, l’enfant ayant repris ses cris stridents. Les mots dans l’oreille ont tout changé, et l’enfant-bulle a retrouvé tout son courage.


    Un drain dans la plaie et 7 (septs ; VII) points de suture plus tard, nous attaquons le tour des pharmacies locales pour trouver l’attelle à la taille du genou d’un enfant grand comme un dossier médical.


    L’enfant-bulle rentre au centre en héros.


    Au centre, on  a  mené l’enquête en notre absence. Aucun caillou n’a été trouvé sur le terrain de jeu du facteur. Le pantalon une fois lavé est impeccable, comme neuf. Un petit jogging gris chiné. La peau trop fine de l’enfant bulle a éclaté comme la peau d’une tomate trop fine, sous le choc de sa chute. C’est ce que l’équipe médicale qui suit le petit bonhomme aux joues à croquer depuis sa naissance a pu expliquer ensuite à ses parents.


    Ses parents, il faut les appeler d’ailleurs. Ils ne me laissent pas parler... Non la grande sœur n’est pas tombée dans l’escalier ; non non l’enfant bulle n’a pas fait de crise d’asthme. Mais il est là, à côté de moi, on va vous raconter ce qu’il s’est passé. Les parents sont fâchés après l’hôpital, vu l’histoire de l’enfant et son dossier, ils auraient du rentrer en contact avec l’équipe médicale qui le suit depuis toujours. Heureusement, tout s’est bien fini. Ces parents là avaient confiance en nous, c’était plus facile d'expliquer. Peut-être qu’avec d’autres parents la gestion de la crise aurait été plus difficile.


    Petit bonhomme a gravé le souvenir de nos colos sur son genou.


    Mais il avait raison : « Chuistombédanslherbe »

     

     

     

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    16 mai 2014 5 16 /05 /mai /2014 21:21

    « J’ai mal à l’oreille ».


    C’est le soir, il est tard. Des mots et un verre d’eau sucré suffisent parfois à soulager les maux du soir.


    « J’ai mal à l’oreille ».


    C’est la nuit.


    C’est la nuit et l’eau sucrée n’a pas suffit. Le thermomètre est formel, les petits maux du coucher annoncent parfois un mal plus grand.


    Mon adjoint si blond aux cheveux longs traverse la nuit et la place du village pour que les gendarmes lui donnent les coordonnées du médecin de garde. En l’attendant,  l’enfant pleure de douleur. Il se serre tellement fort contre moi que j’ai la sensation que s’il pouvait rentrer dans mon corps, il le ferait.


    Deux heures plus tard, enfin, on sonne à la porte. Un vieux bonhomme. Il dit qu’il est le médecin de garde. Il ressemble plus à un Père Noël défraichi. Le bonhomme  s’excuse, il a eu deux urgences qui se sont mal finies, il vient de constater deux décès.


    J’ai le souvenir d’une nuit très très noire dehors.


    L’enfant se serre encore plus fort contre moi. Le médecin l’ausculte, comme il peut, l’enfant est incapable de se décoller de moi. Se faire soigner par un vieux bonhomme qui nous dit au milieu de la nuit que ses patients précédents sont morts, vous seriez rassurés vous ??


    C’est une otite. Au moins, je ne doute pas du diagnostic.


    Enfin, c’est l’ordonnance. Ha non. Le brouillon. Sur un vieux cahier d’écolier petit-format au papier jauni. Une page entière de prescription, recopiée ensuite consciencieusement sur l’ordonnancier. Puis le verdict tombe : « je vais lui mettre un suppo, il a trop mal ! »


    Mais bien sûr. Qui confierait sa petite paire de fesses au Père Noël en retraite ? Et au mois de février ! Il est pas en RTT le Père Noël en février ?

    Pas cet enfant là. Ni moi d’ailleurs. Même si ma paire de fesses n'est pas petite.

     

    Et le médecin peste qu’il ne se laisse pas faire,... « c’est pourtant pas grave ce qu’il a ce gamin par rapport à Madame Duchnock qui mettra plus jamais son dentier ?? » (Désolée Madame Duchnock, j'ai oublié votre nom...)


    Ok Docteur, Merci beaucoup, laissez-moi un suppo, on va se débrouiller !


    Il est 5h quand le médecin part enfin.

     

    Le gamin a déjoué les statistiques du médecin : il a guéri de son otite !

     

     

     

     

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    14 mai 2014 3 14 /05 /mai /2014 21:18

    C’est ma première direction. Nous partons en février dans une grande maison à la campagne, avec une trentaine d’enfants.


    Avant le départ, une maman m’appelle. Elle en a gros sur le cœur de son histoire de maman d’une petite fille venue trop tôt, alors elle me décrit sa toute petite déjà grande. Elle a 8 ans. Elle sait tout faire, mais bien plus lentement que les autres. Elle fait parfois pipi au lit la nuit, mais pas toutes les nuits. Elle est née tellement trop vite que ses petites mains n’ont pas fini de grandir, et sont un peu palmées. Sinon elle va très bien, elle est très contente de partir. Nous convenons avec la maman que cette déjà grande, pour sa première colo, sera peut-être mieux au rythme des plus jeunes, qui ont entre 5 et 7 ans.


    Les enfants descendent du car qui les emmène de la gare. Je retrouve l’enfant bulle qui se cache et sa grande sœur équipée de béquilles et d’une entorse de la cheville, et de la veille ; un grand casse-cou aux os si fragiles qu’on les dit de verre. Il se cassera un orteil, incident hélas courant pour lui. Pour les balades un peu longues il a son fauteuil roulant. Deux étages pour les chambres des grands, ils font tous les deux la course dans l’escalier ; l’une en béquilles, l’autre en chaussettes, incapable de supporter des chaussons sur ses pieds trop souvent cassés …


    Et puis cette grande petite sort du car. Ou plutôt ne sort pas. Elle reste en haut des marches, bloquée, impassible. Je sais que c’est elle. Je sais aussi que ça ne va pas être si simple que n’a voulu le croire sa maman.


    Notre enfant lune parle très peu, on la comprend mal. Elle vit tout très très lentement et semble ne pas suivre ce qui se passe. Elle  a deux yeux magnifiques, et vifs. Mais je ne la comprends pas. Les autres adultes non plus.


    J’appelle le médecin de mon enfance, celui qui m’a si bien aidée ado, et je lui raconte cette petite fille, ce que je vois, ce que m’a dit sa maman. Et lui me répond IMC. Infirmité Motrice Cérébrale. Pathologie d’enfants nés grands prématurés et réanimés. Son système moteur cérébral ne fonctionne pas correctement, d’où cette lenteur à parler, à bouger. « Mais elle comprend tout et retient tout, prenez le temps de l’écouter », me dit-il.


    Alors on l’écoute. Alors on demande aux autres de se taire pour que l’enfant lune puisse nous faire accéder à ses secrets. Elle en a des milliards. Championne au jeu des devinettes. Et ce sourire sur le visage, lorsqu’on lui laisse enfin l’espace temps dont elle a besoin pour se faire sa place. Un sourire qu’on ne peut pas oublier.


    Elle fait partie de ceux dont je n’oublierai jamais le prénom. Je suis persuadée que les autres adultes et enfants aussi s’en souviennent.


    J’ai eu à nouveau la maman au téléphone, longuement. J’espère que cette maman a pu prendre ensuite un peu plus de temps pour expliquer son enfant lune avant qu’elle ne parte en colo. Accueillir un enfant venu d’un autre univers, c’est possible, mais c’est difficile. Cela peut lui faire beaucoup de mal si l’on n’en est pas capable.


    Cela devient une rencontre exceptionnelle pour tous lorsque l’on prend le temps qu’il faut.

     

    1997-oulches.1

     

     

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    13 mai 2014 2 13 /05 /mai /2014 22:21

    Je ne l’ai vu que trois heures dans ma vie.


    Il s’appelle « Boldane ». Ou alors, je n’ai pas compris son prénom.


    Je crois que je n’ai pas compris son prénom. Mais il a répété au moins cinq fois Boldane. Environ.


    Pendant que ses parents savourent une mise en scène de Stanislas Nordey, Boldane est venu manger des gâteaux, des  bonbons, jouer à « Pomme pomme pomme » et « Tomate Ketchup ».

    « Tu connais ? C’est vrai ?  Vrai de vrai ? » me demandera Amandine 14 ans plus tard, en m’expliquant les règles d’un super jeu qui s’appelle « Tomate Tomate Ketchup » !


    En attendant la question d’Amandine, et surtout ses parents, Boldane essaye de m’expliquer des tas de choses que je ne comprends pas très bien, fait des tours géantes de Kapla, les fait tomber en hurlant de rire. Je me demande même si Stanislas ne les entend pas à l’autre bout du théâtre. Mais ce n’est pas très grave, je ne connais pas Stanislas.


    Après le goûter, Boldane mange une sucette. Elle est tellement bonne sa sucette qu’il a les yeux plus grands et plus ronds que ses grandes lunettes rouges et rondes.

     

    Occupée à autre chose qu’à m’occuper de lui, sûrement les autres enfants dont je ne me souviens pas, à moins que moi aussi je ne prenne mon gouter, je perds Boldane de vue. Puis je le vois revenir vers moi, les lunettes à la main, le regard un peu perdu.


    « Tu peux me laver mes lunettes s’il te plait ? ».

     

    Je prends ses lunettes et trouve les lunettes les plus sales que je n’ai jamais vu de ma vie. Même depuis lui. Même les lunettes de ma crapulette.

    « Mais qu’est-ce que tu as fait avec tes lunettes ? » demande-je étonnée et perplexe.

     

     

     

     

     

     

     

     

    « Ben, je les ai léchées ! »

     

     

     

     

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