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    18 avril 2007 3 18 /04 /avril /2007 19:01

    L’homme s’arrête, me regarde de la tête aux pieds. Des pieds à la tête. Il me dévisage.
    Sa main serre trop fort la poignée de la valise qu’il porte.
    Sourcils froncés…

    « Quel âge avez-vous ? »

    Je mens un peu, et me vieillis d’un mois pour obtenir en une fraction de seconde la majorité absolue, le droit d’être adulte et responsable même si ça ne se voit pas.

    Je croyais être un peu grande maintenant que j’aimais avoir le trac, que je savais gérer mes craintes et aider les enfants à gérer les leurs. Cet homme là me replonge à mes débuts, je ne sais plus ce que je fais là.

    Je dois me justifier, donner mon curriculum vitae, celui des collègues que je rejoins. Me défendre d’être la plus jeune aussi. Je dois justifier mes diplômes, mes quelques expériences, prouver que je suis animatrice.

    Il faut que lui l’entende, mais aussi son fils, sinon j’aurai tout raté.

    L’homme me dévisage à nouveau. Il a peur pour son fils. Un long interrogatoire continue, ponctué de regards et de silence.

    Nous sommes à l’aéroport. Je suis toute seule pour assurer le voyage de cinq jeunes, pour rejoindrent avec eux le lieu de leurs vacances.


    Ils sont tous là. Premiers regards, premiers contacts, avec leurs parents pour témoins. L’instant où l’ado est petit mais joue au grand. Je ne suis pas beaucoup plus fière qu’eux.


    Les valises, les instruments, enregistrement des bagages. C’est l’heure de l’embarquement, l’interrogatoire est terminé. Nous prenons l’avion pour une heure seulement, petite traversée d’un petit bout de France.

    Cette fois il n’y aura que des adolescents. Ils seront juste à peine plus jeunes que moi… Ils seront 68.

     

    Nous arrivons les premiers dans le château fort en haut de sa colline. L’endroit est magique. L’autocar avec le groupe de jeunes et l’équipe atterrit à son tour devant le portail.

     

    Sur 68, il  y a plus de 40 garçons. Ils sont très grands, beaucoup plus grands que moi. Ils portent des t-shirts noirs, les cheveux longs, le regard qui se veut dur. Ils sont venus faire du rock.

    Ils n’en finissent pas de descendre de ce car, j’ai le vertige.

     

    Mais qu’est-ce que je fous là avec ma flûte traversière ?

    L’homme avait peut-être raison. Je ne suis peut-être pas encore adulte et responsable…

     

     

     

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    13 avril 2007 5 13 /04 /avril /2007 14:42

    Ces deux là sont jumeaux. Tout pareil, l’un comme l’autre. Ils sont deux sur les listes, mais ces deux là ne font qu’un. Pas simple quand le projet du centre tourne autour du respect de l’individu… Comment faire lorsque cet individu est double ?


    Ils sont jumeaux à tel point que l’un va peu sans l’autre, que leurs prénoms sont siamois. Ça pourrait être Kevin et Melvin, ou Maxime et Maxence, ou encore Théophile et Théodore. Mais ça n’est pas ça. Ils sont tellement un seul qu’ils ont la même valise, le même doudou, les mêmes fringues. Ils sont tellement unis, que lorsqu’un va mal, l’autre aussi, que lorsque l’un rit, l’autre aussi.


    Ils sont si jumelés l’un à l’autre, qu’ils ont tous les deux le même défaut de prononciation. Les sons [s] , [z], [j] ou [ch] se prononcent dans leurs deux bouches de la même langue humide, au milieu du palais, comme un [ch] pas tout à fait [ch], un peu [j] aussi, et surtout très mouillé.


    Leur identité est à deux, complètement, au point qu’ils en jouent et jouent avec nous. Ils se cachent l’un de l’autre, ils se cachent de nous, et nous surprennent. L’un surgit devant nous, peut être tombé du plafond, sorti d’une trappe mystérieuse, toujours soudainement.


    LA question. Celle à laquelle aucun d’entre nous n’a jamais su répondre avec assurance :


    « Alors, [ch]uis Melvin ou [ch]uis Kevin ? »


    Pour moi, cette question, c’est une angoisse. J’attache tellement d’importance à nommer celui qui est en face de moi, à le reconnaître, que mon inaptitude à répondre à cette question me pèse. Ils le savent. Je suis la victime préférée de leur jeu du « ki[ch]ui[j] » ?


    Ils s’y mettent à deux parfois aussi.
    « Alors, [ch]’ est qui mak[ch]ime et [ch]' est qui Mak[ch]en[ch] ? »

    J’essaye à chaque fois, parfois ils me disent que j’ai gagné, mais je ne sais jamais.

    Ils sont tellement pareils, tellement jumeaux, qu’ils ne font vraiment qu’un.

    Que deviendront-ils si un jour ils se perdent ?


     

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    8 avril 2007 7 08 /04 /avril /2007 19:18

    Des mômes...

    Une rubrique pour mettre des mots sur ma vie d'avant, celle où j'étais animatrice, puis directrice de centres de vacances, centres de loisirs. J'ai vu passer un paquet de gamins, qui m'ont plus ou moins marquée. La plupart m'ont construite, m'ont fait grandir. Ce sont des souvenirs, sûrement transformés par ma mémoire, de toute façon transformés par mon regard d'aujourd'hui qui n'est pas le même qu'à mes débuts. Parfois plusieurs enfants se cachent dans un même portrait, parfois ce sont des moments plus que des portraits, des tranches de vie entre parenthèse, et puis parfois des enfants dont je me souviens le prénom, le regard ... l'enfant.

    Je ne souhaitais pas "raconter" la vie des colos, et au fil des mots c'est finallement l'histoire de mon cheminement auprès d'eux, de rencontre, et d'un métier qui m'a passionnée

    Ce sont des mots pour ne pas oublier ce qu'ils m'ont apporté, ce que j'ai essayé de leur donner, ce que j'ai partagé avec tous les autres adultes qui m'ont accompagnée dans ce bout de chemin riche et passionnant.


    Les articles (le début, c'est tout en bas...)

    1995 : l'histoire du soir

    1995 : Les vieux

    1995 : Le courrier qui pleure

    1995 : les amoureux


    1995 : Les clowns


    1995 : Sofiane

    1995 : Le départ


    1994-95 : En péniche, pas de quartier !

    1994-95 : En péniche, sexe, drogue et rok n'roll

    1994-95 : En péniche, petits bobos et grands frissons

    En péniche : d'aventure en expédition

    En péniche : la colère

    1994-95 : la péniche

    1994 : maman

    1994 : les ados - 9 : c'était pas fini (par Thomas)

    1994 : les ados - 8 : épilogue

    1994 : Les ados - 7 : L'orage

    1994 : Les ados - 6 : Longue journée

    1994 : les ados - 5 : Le J9

    1994 : les ados - 4 bis : les réactions de Tom sur les articles "Thomas" et "les nuits"

    1994 : les ados - 4 : Les nuits

    1994 : les ados - 3 : Thomas

    1994 : les ados - 2 : les filles au théâtre

    1994 : Les ados - 1 : l'avion

    1994 : Jumeaux

    1994 : La pluie

    Général : jeux de piste

    1993 : Pipi au lit

    1993 : Les experts

    1993 : La bande

    1993 : La fugue

    1993 : Petit Géant des Carpates

    1993 : Petit bout de femme, petit poussin perdu

    1992 : Quand je sera grand, je sera Popeye

    1992 : 12 ans, du fric, des fringues

    1991 : La Fermeture Eclair

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    23 mars 2007 5 23 /03 /mars /2007 23:25

    Une colo sous la pluie. Je ne sais plus si c’était février ou Pâques comme vacances.

    Le rythme s’est pris tranquillement dans cet internat tout rose. On a débarqué là par hasard, les dépendances du joli château qui nous étaient réservées manquent de lits pour accueillir le grand groupe. Par contre, l’internat est presque trop grand. Des Mickeys peints sur les murs. Je ne me souviens pas du village autour de l’internat, il est peut être un peu loin.

    Il y a nous.

    Il pleut tellement tout le temps que l’on chante à longueur de journée, il ne faut pas déséquilibrer l’ordre établi. La pluie rempli les lacs, il y en a plus de 1000 dans ce paradis des insectes et des grenouilles.


    Mais quinze jours sous la pluie, c’est long, ça mouille, c'est froid, et c’est triste.

     

    Alors on chante.

     

    Mais quinze jours sous la pluie, c’est quand même long, ça mouille, c'est froid et c’est triste.

     

    C’est sans compter sur le magicien. Un grand mec tout sec et barbu qui connaît tous les coins et recoins des mille lacs, qui sait où se cachent les hérons même quand il pleut, qui sait trouver les bourgeons cachés, les nids de vipères, qui est copain avec les cistudes, ces tortues reines de la Brenne. Un elfe qui fait corps avec cette nature là, un elfe qui fait prendre l’air et l’eau à notre musique. Il n’est pas là tout le temps, il apparaît au centre comme s’il sortait des étangs pour le bonheur des enfants.


    Des heures dehors, sous la pluie, avec les bottes en caoutchouc et les K-Ways qui collent. Des heures à observer, chercher, écouter, se passionner pour ce petit coin de paradis où la nature est encore la plus forte. Des enfants qui n’ont pas envie de rentrer se mettre au sec. Des enfants de la ville conquis par la nature, si vraie qu’elle colle aux semelles et creuse l’appétit.

    Les mômes n’ont pas vu le soleil, mais sont rentrés avec les joues rouges. Quand le ciel se dégageait, ils faisaient des bulles de savon. C’était pour faire encore revenir la pluie ?


     

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    5 mars 2007 1 05 /03 /mars /2007 19:01

    J’adore ce moment.


    Je suis toute seule au milieu de nulle part, loin de la ruche. Dans mon sac à dos, des crayons, un canif, une bouteille d’eau, du papier crépon, des cailloux, de la ficelle, des bouts de papiers, du bazar, plein de bazar. J’adore ce moment.


    Je suis déjà venue une fois,  pas forcément toute seule. Avec un carnet et un crayon. Chercher des idées. Il faut transformer ce nulle-part en terrain de jeux.

    Pourquoi ?


    Parfois pour trouver un camping, parfois pour découvrir une ville, une région, un pays, ou juste la colo. Parfois juste pour jouer, comme ça. Parfois aussi pour sauver une princesse de l’empoisonnement, ou un lapin de l’attaque des sorcières. Parfois, juste pour jouer, comme ça.


    L’imagination en folie, chaque arbre se transforme en elfe, chaque rocher en orque, chaque commerçant en complice, chaque brindille en prétexte, chaque décor de la vie en aventure extraordinaire.


    On peut aussi sortir de notre sac-à-malices la série scientifique d’indices, de codes secrets, de jeux de l’avocat et autres subtilités au jus de citron.


    C’est pas simple, il faut un début, une fin, un objectif, il ne faut pas que ça soit facile, ni trop dur, il ne faut pas que les plus grands s’ennuient, que les plus petits se perdent. Il faut que tout le monde s’amuse, sportif, rêveur ou intello. Un défi pour une journée ou une demi-journée à ne pas oublier. Je préfère lorsqu’il n’y a pas de grand vainqueur, que le plaisir est d’avoir joué, d’avoir cherché, essayé, que tout le monde soit vainqueur. Je sais, ça a un petit côté école des fans, mais je m’en fous, et puis je ne donne pas de note.


    Ensuite, vient le moment. L’installation est terminée, les groupes sont constitués, le jeu commence. C’est un peu comme une grande fête ou un superbe repas. La préparation a été longue et minutieuse, tout est dévoré en un instant. Le crépon est délavé, les indices sont brûlés, les cachettes désintégrées, les secrets dévoilés. C’est terminé. Les enfants ont gagné, ils méritent une bonne douche, les adultes sont déjà rincés. Tout le monde a chaud aux joues.


    Mais ce n’est pas fini, il faut revenir sur le lieu de l’action pour enlever les indices, pour que cet univers oublie notre passage, et remercier nos complices. C’est un peu la pause café, prendre rapidement le temps de savourer ce qui s’est passé.


    J’ai aimé le faire en Hollande, dans un pays dont on ne parle pas la langue. J’ai adoré le faire dans la petite ville ou maman a grandi, là ou j’ai partagé les secrets de mes grands-parents avec les enfants. J’ai aimé la tronche des mômes qui comptent le nombre de petits carreaux d’un château (ça c’était pas gentil, c’était plus de 400), les regards de ceux qui cherchent le goût de ce qu’ils ont dans la bouche, l’hésitation à entrer dans un nouvel endroit, les prises de becs pour comprendre les énigmes, les rencontres avec les complices pas toujours coopérants, les petits qui trouvent plus vite que les grands, les tricheurs qui se trouvent pris à leurs propres pièges, les prières des mômes pour que les dés obéissent, les rattrapages in extremis parce qu’on a oublié un indice qu’un indice a disparu.

    Les Castors Juniors 


    Parfois, au boulot, on me demande de faire un truc qui me semble impossible. Je me rappelle ces moments là, et c’est en jeu de piste que je résous les énigmes. Et j’adore ça.


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    25 février 2007 7 25 /02 /février /2007 22:49

    Toutes les nuits c’est pareil. Tous les matins, même réveil.
    Quand on rentre dans ta chambre, l’odeur est forte, ton lit est trempé, tu n’oses pas bouger.


    Chaque soir, tu as peur d’aller te coucher.

    La journée commence par un déballage de draps, une douche chaude, et un câlin compréhensif. Ton matelas est lavé à grande eau et sèche dans la cour chaque jour.


    Je n’imaginais pas qu’un enfant pouvait faire autant pipi.


    C’est difficile d’empêcher les copains de se moquer. Tu n’es jamais tout à fait avec eux au moment du petit déjeuner. Je n’aime pas ça, toi encore moins.


    Je pensais que je serais dégouttée par les pipis au lit. Mais il m’a suffit de voir ta tronche pour essayer de gérer ça tant bien que mal. Je me sens impuissante devant ta détresse d’enfant qui ne sait pas où se fourrer. Le directeur veut que je te réveille la nuit, il en a marre côté logistique. Le matelas dans la cour, le personnel de ménage qui râle. Un enfant comme toi, ça gène. Mais je ne sais pas réveiller un enfant qui dort. Et je ne sais pas comment en parler avec toi.


    Un soir comme les autres, tes grandes mains foncées dans les miennes si blanches, on commence à mettre des mots sur cette histoire. Je te raconte la nuit de la colo, tu me poses des questions.

    Je t’explique ce qui se passe lorsque vous dormez. Mon passage dans vos chambres pour vérifier que tout va bien, pour remettre dans son lit ton copain qui a pris l'habitude de s'endormir par terre, ou celle qui croit que son lit est beaucoup plus grand et s'affale comme une masse sur la couette qu'on dépose là chaque soir, pour éviter que la chute ne soit trop rude. Il y a aussi les adeptes du sommeil les fesses en l'air, drôle de quattre pattes avec la tête posée. Là, c'est plutôt la couette qui est par terre. Parfois, un bisous à un enfant aux yeux grands ouverts, que je soupçonne d'attendre, pour vérifier que nous sommes toujours là. Il y a les doudous qui se promènent, un jouet qui traine oublié la journée, et puis toi, qui dort encore au sec. Jusqu'à quand ?
     

    L’idée vient de toi. Tu me demandes de te réveiller à ce moment là, avant d'aller me coucher, à ce moment que j'aime, douceur de la nuit. Te réveiller pour que tu ailles aux toilettes. Peut-être que ça va marcher ?


    Tu dors profondément. Tu as 5 ans, mais tu es très grand, très fort. J’ai beaucoup de mal à te réveiller, à te bouger un peu. Tu finis par aller aux toilettes, enfant automate dont les yeux dorment encore. Tu grognes, mais tu fais pipi et tu retournes te coucher.


    Au réveil je viens te voir. Tes yeux sont en colère. « Pourquoi t’es pas venue ? »

    Mais ce matin, ça sent juste la nuit d’enfants dans cette chambre, ça sent la pénombre des matins d’été, une odeur normale de réveil. Je souris, et tu réalises que tu es au sec. Je te raconte ta virée automate au bout du couloir. On rigole. C’est ton premier vrai p’tit déj depuis le début de la colo.


    On recommence chaque nuit jusqu’à la fin du séjour. Il y a encore quelques petits accidents, mais si peu.


    J’ai emmené ta recette avec moi pour la partager avec d’autres enfants qui avaient peur de la nuit. L'un d'eux se recouchait systématiquement en faisant une galipette sur son lit, et ne s'en rappelait pas le matin.


    Merci bonhomme !


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    18 février 2007 7 18 /02 /février /2007 14:53

    Ça a commencé par moi. Un tout petit bouton très étrange dans le creux du poignet droit. Pas très gros, bizarre. Je le montre à un collègue qui passe son doigt dessus, tout doucement.


    Hurlement. Ne recommence jamais ça ! Le bouton s’est transformé en pustule. Un truc purulent, pas beau, jaune, comme ça d’un coup. C’est pas très gros, mais qu’est ce que c’est moche. Et ça fait mal.


    Les filles se plaignent, elles ont les mollets qui grattent. L’observation est rapide : elles ont des pustules sur les mollets. Pas une pustule, non plein de pustules. Quelques unes se sont grattées, et le truc s’étend, c’est horrible. Plusieurs pleurent, ça fait flipper et surtout ça fait mal.


    Quelle malédiction est tombée sur notre chapiteau sans toit ?


    Ce n’est plus la colo cirque, c’est « Les Experts Dordogne ». Je sais, ça sonne moins bien que « les Experts Manhattan », mais ça y ressemble. Un peu. Le toubib et le pharmacien sont invités, les "evidences" sont rassemblées, les microscopes et autres tests d’empreintes convoqués.


    Liste des indices :
    - Une seule adulte touchée, au poignet droit. Première victime.
    - Les petites filles sont quasiment toutes victimes de l’attaque chimique, aux mollets. Toujours les deux mollets.
    - Les garçons ne sont pas atteints.

    Liste des faits :
    - Nous sommes partis pique-niquer en forêt.
    - Les garçons avaient tous des pantalons (on commence à s’approcher de la vérité), les filles étaient en short.
    - Et Nelly ? En pantalon… depuis quand je marche sur les mains… Jamais… mystère.
    Le toubib et le pharmacien veulent savoir où nous étions. Les filles sont attachées et bâillonnées de manières à ne pas pouvoir se gratter les mollets, ni pouvoir échanger leurs miasmes. Il ne faudrait pas que ça continue à s’étaler cette cochonnerie. Et si ça se transmettait par les larmes ?


    Les garçons ? Ils se moquent et ventent les mérites des pantalons.


    Expédition en forêt, nous sommes en combinaison intégrale, la bête n’est pas loin. A défaut de guet-apens armé derrière les buissons, le pharmacien et le toubib cueillent des plantes et courent s’enfermer dans le labo.


    Le suspense est total. Je débaillonne les filles, elles ne sont pas suspectes, cette précaution s’avère inutile.

    Quelques heures plus tard, retour des Experts. Ils sont formels, ils ont trouvé le coupable. Un truc vert, qu’il ne faut surtout pas manger, et qui porte un nom barbare. Les filles se sont assises juste dedans. Moi aussi, et j’ai du me relever en m’appuyant sur mon poignet. Erreur à ne jamais refaire.
    Les garçons aussi étaient assis dans cette prairie maudite, mais le pantalon est une excellente invention pour les aventuriers.


    Le médecin se lance dans un cours accéléré de perçage de pustules. Comment désinfecter-percer-désinfecter-nettoyer-compresser-protéger les mollets des gamines, avec des petites aiguilles stériles. On détache les filles (hé ho tu m’as pas cru quand même ?) et on s’y met. La peur est retombée, Maintenant, c’est « Urgence » un soir de catastrophe herboristique.


    La catastrophe a duré une journée, mais on a rendu à leurs parents des filles avec les mollets balafrés.  Et surtout, on n’a jamais remis les pieds dans cette forêt maudite.


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    14 février 2007 3 14 /02 /février /2007 11:26

    Tu es la bande. La bande des gars des filles de plus ou moins 9 ans. La bande de mômes qui s’éclate, qui a envie de tout, tout le temps, qui bouffe la vie à pleines dents, qui vit un cirque permanent. Sourires aux lèvres, yeux qui pétillent, tout est simple avec toi, bonheur tranquille…


    5 gars, 5 filles, la bande tourne à 10, peut être 8, un nombre pair, c’est sûr. C’est le mot juste : tourner. Une espèce de tourbillon pour tout ce que vous faites. Jongleries, acrobaties, monocycle et autres clowneries. Il n’y a pas de chapiteau mais il suffit de vous voir pour l’imaginer.

     

    1993 - la fugue 

    Premiers amours aussi. Découverte de l’autre, amours futiles mais sérieux, qui durent quelques jours. Expérience de l’enfance qui s’amuse à aimer et aime sérieusement. Qui aime un jour, pleure le soir et aime à nouveau le lendemain. Mais pas le même, pas la même. Tu aimes tellement ta bande que tu ne sais pas lequel laquelle tu aimes d’amour. Peut-être aucun, peut-être tous. Les mains qui se touchent, qui s’attrapent et se serrent, sourires échangés, bisous sur les joues.


    On a longuement parlé de la langue. Avec ou sans ? Grande question… Peut-être que certains d’entre vous ont essayé, mais la langue qui vous posait tant de questions n’était pas encore d’actualité. Grimaces.

    Juste les bisous, parfois jusque dans le cou, c’était déjà beaucoup.

    Le soir, glissé à nos oreilles avant de t’endormir : « tu peux « lui » faire un bisou et « lui » souhaiter bonne nuit s’il te plait ? » Votre Dallas de l’été était difficile à suivre, alors ont vous présentait à tous les bisous de « l’autre », sans le nommer, sans la nommer. Parfois, le sourire s’effaçait de ton regard… « mais non, on s’est séparé, tu savais pas ? » Premiers désamours aussi, dans les tourbillons de vos vies. Jusqu’au lendemain.

    Je me plais à imaginer qu’après le retour vous avez continué à vous aimer, pas seulement en souvenir. Il ne vous avait fallut que quelques jours pour que tu deviennes une bande, précieuse rencontre…


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    22 janvier 2007 1 22 /01 /janvier /2007 23:46

    A douze ans, je comprends qu’on puisse être en colère. Tu en veux à ton père que tu ne connais pas, tu en veux à ta sœur qui est gravement malade, tu enveux à ta mère de tout ça. Tu en veux à la terre entière. Et puis tu te prends pour une merde. Difficile de te faire comprendre que ça ne tient qu’à toi de croire que tu vaux un peu plus que si peu.

     

    Je ne te comprends pas et j’ai peur de tes réactions. En plus, je te trouves très grand, avec un regard parfois méchant. Par contre, je ne sais pas comment tu y arrives, mais tu sais faire tourner une assiette chinoise au bout d’une baguette en lisant un roman, le tout grimpé sur une étagère de presque 2 mètres de haut. En plus, l’étagère n’a qu’une structure métallique et pas de planche,… même pas mal. Et tu restes longtemps… Pour une merde incapable de quoi que soit, c’est déjà pas mal. A part peut-être la môme qui a un monocycle a la place des jambes, il y en n’a pas beaucoup qui en sont capables.

     

     

     

    Tu profites d’une balade dans la ville du coin pour te sauver, te cacher, disparaître. Je crois qu’on s’en rendu compte très vite. La règle est simple, si on ne t’a pas retrouvé dans les 10 minutes, c’est la gendarmerie. On te connait juste suffisamment pour savoir que tu aimerais retourner chez ta mère, suffisamment aussi pour savoir que tu as besoin qu’on te montre à coups de pieds au cul qu’il y a des gens qui tiennent à toi. Non, pas ceux là de coups de pieds au cul, les autres, avec des mots, même si c’est pas toujours évident. Et moi, même si j’ai toujours peur de tes réactions, j’ai aussi très envie de te connaître, et surtout pas envie de te perdre.

    D’ailleurs j’ai toujours envie de perdre personne.

     

     

     

     

    On te cherche à corps perdu, pendant que quelques-uns prennent soin des autres enfants. Tu es là, pas loin... tu fais de la brasse coulée dans un buisson, pour être sûr qu’on ne te trouve pas tout de suite. Je ne suis pas sûr que ça t’aurait fait beaucoup de bien que ce soit un gendarme et son chien qui te débusque à notre place, et tout ce qui s’en suit.

     

     

     

    Retour à la colo. Il me semble que sur ce chemin là, il y a à peine un mot, un regard. J’ai eu tellement peur que si je te parle je te hurle dessus, et ce n'est pas la solution. Petit con, t’es un de ceux qui m’a fait le plus peur… et pas qu’à moi.

    A notre retour, un des animateurs crie. Simplement pour te dire qu’il trouve que tu n’as pas le droit de nous faire ça. C’est vrai qu’on te laisse relativement vivre ta vie, que le cirque comme on y joue ce n’est pas pour toi, mais que tu vis ton propre cirque dans notre rythme à nous, que tu as ta bulle avec toi, ton étagère rien que pour toi, et que l’on sentait jusqu'à ce que ce que tu disparaisses que l'on commençait à avoir confiance. On croyait même que c’était réciproque.

    Petit con, quand j’écris ces mots là j’en tremble encore… et tu serais allé où ?

     

     

     

    Je ne sais pas d’où lui sort cette idée. Cet animateur t'autorise en criant à ta cacher, mais tu n'as plus le droit de sortir de la colo. Le cirque reprend son rythme : châteaux de cartes, chants dans la cour, repas sympas et jongleries en tout genre. Une colo bien chouette aux portes du soleil. Et toi sur ton étagère, à bouffer des mots en faisant tourner une assiette.

    Tu vas un peu mieux, même si tu n'es toujours pas à ta place, et la confiance revient doucement. u n'es jamais méchant, pourtant tu ne te sens pas à ta place.


    1993 - la fugue 

     

     

     

    Nouvelle journée, nouvelle colère, et toi plus là. Dix minutes chrono avant le plan hors sec, on s’y met à plusieurs. Ça ressemble à un grand cache-cache, mais pas pour jouer, avec la boule au ventre en plus.

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

    Petit con.

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

    Tu t'es caché dans la chaufferie. 


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    17 janvier 2007 3 17 /01 /janvier /2007 19:53

    Il est arrivé en vacances, et il est heureux. Je peux le nommer Ivanov, Igor, Boris, Grishka, Stanislas, Youri ou Dimitri, Evgueni ou Sergueï. Ses parents lui ont donné un prénom slave, et ça lui va comme un gant.

     

     Il porte en lui toute l’image que l’on se fait des slaves, ce côté fort et solide, la démarche assurée bien plantée dans le sol, le regard direct et franc, le sourire éclatant. Il suffit de le regarder pour savoir comment il va, et il va bien.

     

     Activité clown. Pour démarrer, le clown travaille son entrée. Dos au public, l’enfant se retourne, et tout en lui doit être clown. C’est assez difficile. Lorsque celui-là se retourne, le reste du petit groupe rit. Rien de ridicule, non. Il est juste là, entier, heureux, et il communique tout ça directement à ceux qui sont en face de lui.

     

    Un jour, celui-là se fait mal au coude. Il a beau avoir toute la force slave qui émane de lui, il n’empêche qu’il n’a que 5 ans, et qu’à cinq ans parfois on se fait mal. Il pleure comme il rit, entier, d’un bloc, très fort et tant que ça fait mal. Il pleure un bon moment…

     

     Plusieurs médecins le voient à l’hôpital, lui font des radios dans tous les sens, lui font mal, le font hurler. Jusqu’à ce qu’un médecin arrivé de nulle part vienne voir d’où proviennent ces cris… petite manipulation douce du bras, un coup plus fort, l’enfant hurle plus fort aussi. Le médecin se penche vers l’enfant, lui murmure quelques mots à l’oreille. Les pleurs s’arrêtent, l’enfant bouge son bras juste un peu, et il rit. C’est fini, c’est « reboîté » comme il me dira plus tard. En fait, c’était plus qu’un médecin, c’était un super héros… grâce à lui le petit slave est revenu à la colo en géant des Carpates.

     

     Je n’ai pas vécu l’hôpital avec lui, j’étais occupée avec une enfant-poussin qui n’avait pas été touchée par la grâce slave, mais les copains me racontent. Et je le vois revenir, le teint blême, le bras en écharpe, les cheveux collés d’avoir hurlé toute la journée, mais le sourire jusque dans les yeux, et vénérant le super héros qui lui a permis de revenir juste à temps pour la boum d’anniversaire de sa grande copine…

     

    1993 - Carpates 

     Si seulement ils avaient tous la force de ce bonheur là…



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