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    12 décembre 2006 2 12 /12 /décembre /2006 17:43

    Le train n’est pas encore parti et toi tu pleures. Je te parle mais tu ne le sens pas. Je te touche mais tu ne me vois pas. Je te regarde mais tu ne m’entends pas. Je suis là mais tu ne le sais pas.

     

     

    Le train est parti et je comprends tes pleurs maintenant. « Ma valiiiiise ! ».  J’essaie : « tu veux que je ramène ta valise près de toi ? » J’ai fendu la coquille et ça y’est tu m’as vue.

     

     

     

    Petit bout de femme petit poussin perdu.

     

     

     

    Tu renifles tu dis oui. Ta valise est très grande, on pourrait te ranger dedans. Ta valise est rouge. Quelqu’un la range au dessus de ta place, escargot a retrouvé sa coquille. Ça va aller mieux maintenant.

     

     

    Je te dis mon prénom, je lis le tien sur un bout d’étiquette. Mais ça ne va pas mieux. Tu pleures de nouveau, tu pleures de plus belle. « Ma coueeeeettte ! »

     

     

    Petit bout de femme petit poussin perdu.

     

     

    Je ne comprends pas pourquoi tu me parles de tes cheveux. Tu me montres ta valise. On finit par comprendre et tu trouves ta couette. C’est pour ça que la valise est grande, il fallait mettre la couette dedans.

     

     

    Peanuts - Linus 

    Tu as retrouvé ta valise et ta couette, mais pas encore ta coquille. Si je m’éloigne, tu pleures. Mais je m’éloigne quand même. Tu te bouches les oreilles et tu cries : « Nellyyyyyyyyyy ! »

     

     

    Petit bout de femme petit poussin perdu.

     

     

    Souvent je me suis éloignée de toi. Souvent tu as percé les tympans des copains. Un jour tu t’es agrippée aux tuyaux d’une salle de bain jusqu’à ce que je vienne. Tu étais plus que perdue dans un monde pas fait pour toi.

     

     

    Un autre jour, tu as eu du courrier. C’était signé papa et maman. C’est moi qui te l’ai lu, tu étais trop petite. Tu t’es mise en colère. Cette fois là, tu n’as pas pleuré, tu as trouvé des mots. Pour dire que ton papa et ta maman te mentaient, « ce n’est pas vrai, ils ne sont pas ensemble, ils veulent que me faire croire, ils sont plus amoureux ». Tu as crié longtemps. Tes mots étaient méchants,durs, mais tu ne pleurais plus.

     

     

    Et puis nous sommes rentrés. Ta grande valise rouge au dessus de ta place, ta couette avec toi, et puis moi pas très loin. Tu étais contente de les retrouver.

     

     

    Ils t’attendaient ensemble. Mais tous les deux pensaient que l’autre partirait avec toi. Tu étais attendue, mais tu n’étais pas prévue dans leur programme. Ils t’avaient éloignée pour s’occuper de leurs souffrances d’adultes. Ils t’avaient éloignée pour t’épargner, mais tu avais tout compris. Et rien n’était réglé.

    Petit bout de femme, petit poussin perdu… j’espère qu’ils t’ont retrouvée.

     

     

     

     

     

     

     

     

     Tu m’as épuisée, mais je ne t’ai pas oubliée… 

     

    Peanuts - Linus 

     



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    30 novembre 2006 4 30 /11 /novembre /2006 19:22

     

     

    Celui là, il est tout petit.

    En fait, il est tout petit parce qu’il ne mange pas beaucoup, et il a encore plus l'air tout petit parce que c’est le plus petit de la colo, et que les plus grands ont 14 ans.

    Lui, il a 5 ans.

    Non seulement il ne mange pas beaucoup, mais ce pas beaucoup là, il le mange lentement. Très lentement. Je crois bien qu’il n’aime pas manger.

     

     

     

    Cet enfant qui ne mange pas beaucoup et très lentement a de très, très, très grandes ambitions. Il veut devenir « comme Popeye ». Non, il veut devenir Popeye. D’ailleurs, quand il nous parle de Popeye, il s’allume. Cet enfant là rêve de biceps tatoués même si ses petits bras sont tous fins.

     

     

     

    « Tu sais, moi j’aime les épinards. » C’est peut-être le seul enfant de la colo à aimer les épinards, à manger des épinards. Le cuistot est une perle rare, l’enfant a régulièrement droit à ses épinards, rien que pour lui.

     

     

     

    D’animateur, nous voilà devenus scénaristes. Nous écrivons toutes les versions possibles de « Popeye passe à table ». Du coup, il mange. Le plus dur, c’est la mimolette. Je ne sais pas pourquoi, mais « Popeye mange de la mimolette », ça ne passe pas. Ce n’est pas une histoire de goût, non non, juste qu’il n’y croit pas.

     

     

     

    C’est la fin du repas. Les enfants sont disciplinés, autonomes : chacun débarrasse son coin de table, l’essuie, et retourne sa chaise. A la fin du repas, ce petit bonhomme est entouré de pieds de chaises plus grands que lui. A la fin du repas, je me rapproche de lui. Il sourit. Je dois avoir une meilleure tête que les barreaux de chaises. On passe du temps côte à côte, on ne se dit rien ou presque. Parfois il m’explique que Popeye, si si, il mange des naricots quand il a tout fini ses zépinards. Parfois, je lui lis ses cartes postales.



      

    1992-popeye 


    Avant de quitter le réfectoire, je retourne sa chaise, parce que ses biceps ne sont pas encore assez costauds. Ça prend du temps pour devenir Popeye.

     

     

     

    Ça sent déjà le produit pour laver le sol lorsqu’on repart vers la vie de la colo, tranquillement.

     

     



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     PS. Bienvenue Joseph ;o)

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    23 novembre 2006 4 23 /11 /novembre /2006 20:31

    Toujours habillé de clair, ce ne sont pas des fringues, ce sont des habits. Stature qui nous regarde de haut. Petite touche de gel dans les cheveux. Tu es beau, tu es propre, et tu joues au ping-pong avec un style de tennisman.
     

    Tu as douze ans, pas de fermeture éclair, et plus de 200 francs pour 15 jours de colo dans le petit bled du Maine et Loire où a grandit ma maman.  D’ailleurs non, ce n’est pas une colo cette fois, c’est un stage. Les enfants sont venus pour jouer de la musique pendant quinze jours, et ils vont bosser comme je n’ai jamais bossé mon instrument.


    Une soixantaine d’enfants de 7 à 18 ans, 3 animateurs, une directrice, et plein de profs de musique dont un seul qui est présent au-delà des cours parce qu’il le veut bien.

     
    Un jour, les enfants jouent à « Fort Boyard ». Nous, nous y jouons chaque jour, pour avoir le temps de passer dans toutes les chambres et de connaître chaque enfant. Mais qu’est ce qu’on passe un bon séjour, fichtre diantre, ce sont 15 jours fort sympathiques ! Et les mômes nous le rendent bien !

    Toi, tu joues du hautbois. Comme je suis flûtiste aussi un peu, je suis l’animatrice musicale référente des enfants qui jouent des instruments à vent, donc je suis « ton animatrice » même si tu vis peut-être dans un château et pas moi.

    Tu deviens tout rouge quand tu souffles dans ton hautbois, ça t'enlève un peu de la classe que tu as toujours, même au réveil.

     

     

    1992. 12 ans ... 


    Je ne crois pas que je suis jalouse. Je te juge « juste » sur ce que tu dégages, futur vieux-beau aux cheveux grisonnants comme on en voit dans les séries américaines. Certains des autres enfants viennent du même milieu que toi, mais toi, ça se voit toujours, et pas qu’un peu.



    Séquence courrier.


    Le courrier, en colo, c’est sacré. Jusqu’à douze ans, on pointe les courriers reçus, les courriers partis vers le HLM résidentiel ou le château de banlieue. Par contre on ne lit pas, ça s’appelle le respect. Mais on distribue à l’heure du repas. Les noms des heureux destinataires sont criés dans le réfectoire. Ceux qui attendent désespérément se taisent en silence. Le repas, c’est aussi l’heure des coups de fil. Là encore, on appelle l’enfant au téléphone. Il y va avec sa pile de cartes postales, parce que c’est le même que celui qui a eu du courrier.

    J’ai l’impression que c’est une coutume d’organisation le repas-courrier-téléphone en colo. Le respect trouve ses limites dans l’organisation, c’est bien connu, et c’est la vie. Moi aussi j’ai osé appeler dans le réfectoire celui qui avait un colis, un appel. Après j’ai arrêté. Le courrier, c’est intime, ça se partage que si on veut. Et le repas, c’est fait pour manger, diront certains qui auront raison !

     

    Mon hautboïste ne reçoit pas de courrier. Mon hautboïste ... tu as du fric, des fringues, un hautbois mais tu es triste. Et ça ne se fait pas d’être triste quand on a du fric, des fringues, un hautbois, et onze ans. Alors tu frimes. Jusqu’à ce que tu te laisses aller et te montre un gamin spontané, souriant, un peu fou-dingue, super calin, vraiment sympa. Mais triste...

     
    A la fin du séjour, tu es plus détendu. Pas envie de partir parce que chez toi l’enfant grandit tout seul. J’espère et je crois que tu as pu exister juste pour ce que tu étais, pas pour ce que tu avais, le temps d’une parenthèse. J’espère que tu n'as pas oublié cette parenthèse, que tu es devenu autre chose qu’une apparence.

    J’espère aussi que tu ne juges pas trop ses parents. Eux aussi ont leur histoire.





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    21 novembre 2006 2 21 /11 /novembre /2006 20:16

    C’est ma première colo. J’ai 18 ans tout pile. Je suis contente d’être là, même si j’ai le trac.

    Je suis animatrice.

    Ils sont 8 dans 2 piaules. Ça fait juste 4 ou 5 ans qu’ils ont vu le jour, et on me les confie.

     

    Je dois être grande.

    1991.fermeture éclair 

     

     

    C’est l’heure du premier inventaire. Moment crucial de découverte l’un de l’autre, moment où l’enfant se dévoile et l’adulte l’apprivoise.

     

    C’est ton tour. Petit bonhomme tout blond de 4 ans, et un joli prénom pour jouer à faire des rimes. Et une fermeture éclair. Mais je ne le sais pas.

     

    Sur le haut de ta valise, une pochette plastique avec les ptits trous pour mettre dans un classeur, toute tordue, plein de papiers dedans. En couverture, une écriture géante : « si prise en charge médicale d’urgence nécessaire, problème cardiaque ou anesthésie même locale, appeler d’urgence l’hôpital …» et un numéro de téléphone. Rouge. ROUGE

     

     

    J’avais le trac. Maintenant j’ai peur : je n’suis pas sûre d’être assez grande.

      

    Tu me regardes souriant : « oui, tu sais c’est pour ma fermeture éclaire les papiers. Regarde.» Tu soulèves ton maillot.

     

     

    Je ne savais pas que c’était si grand un cœur d’enfant.

     

     

    « Mais tu sais, je suis guéri maintenant ». Je ne suis pas encore rassurée.

     

     

    Petites chaussettes et autres shorts trouvent leur place. Et la photo de papa et maman sur la table de nuit.

    Je fais de mon mieux et je crois que tu vas bien.

     

    La directrice me dit qu’elle savait. Je crois que j’aurais aimé ne pas le découvrir  dans la valise, il me faudra un peu de temps pour en être sûre.

     

     

    La vie de la colo se déroule. Je me souviens de pompons, de balais, de musique, de leurs tronches, de leurs sourires et de leurs prénoms. Je me souviens de tes lunettes jaunes aussi. On n’oublie pas les premiers.

     

    1991.fermeture éclair 

     

     

    Je suis bien dans cette vie là.

     

     

    Et je me souviens des vautours. On se promène au parc animalier, dans l’enclos des vautours. Tu t’approches un peu trop près, le vautour a peur.

     

    Toi aussi. Hurlement de terreur d’un enfant pas plus haut que deux vautours, ou trois pommes et demi.

     

     

    Non. Pas d’un enfant. De toi. De toi, celui qui a une fermeture éclair et un numéro de téléphone rouge que j’ai appris par cœur.

     

    Mon cœur à moi fait une pause et j’ai très chaud à l’intérieur.

     

     

     

    Un câlin et des mots ont suffit. Tu avais raison. Tu as l'air d'être guéri.

     

     

     

    Et je sais que je peux trouver les mots, même quand j’ai très peur.

     

     

     

    Mais j’ai toujours eu le trac. C'est bon le trac.


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